Les auteurs et les éditeurs demandent d'urgence l'adaptation du régime de la rémunération de reprographie
Ils subissent plusieurs millions de pertes alors qu’une copie d’œuvre protégée n'a jamais été aussi chère
Les auteurs et les éditeurs, de concert avec les sociétés de gestion* qui gèrent leurs droits de reprographie, exhortent les responsables politiques à revoir en profondeur le nouveau régime de reprographie, également nommé loi sur la photocopie. Celle-ci leur fait en effet perdre la moitié de leur rémunération de reprographie. Le paradoxe, c'est qu'une photocopie d'œuvre protégée coûte aujourd'hui 2,7 fois plus cher par page qu'autrefois. Pour que chacun prenne conscience de l'importance d'une indemnisation correcte pour la photocopie de livres, ouvrages pédagogiques et scientifiques, quotidiens, magazines, bandes dessinées, photos et illustrations, un site Internet spécifique a été préparé à destination de la campagne : www.donnant-donnant.be
Les revenus des auteurs et éditeurs en chute libre
Chaque année, plus d'un milliard de pages d'œuvres soumises au droit d'auteur sont photocopiées en Belgique. La rémunération que percevaient les auteurs et les éditeurs pour leur travail s'est élevée à presque 24,4 millions d'euros en 2015. Mais depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, qui supprime la redevance pour reprographie sur les copieurs et les appareils multifonctions** et la remplace par une hausse du prix par page, les auteurs et éditeurs ont vu s'évaporer en 2017 la moitié de leurs revenus autrefois tirés des droits de reprographie. Ceci représentait une source de revenus complémentaires considérable pour beaucoup d'auteurs. Le nouveau régime spécifique aux établissements d'enseignement et de recherche est également très défavorable aux auteurs et éditeurs, parce qu'il englobe désormais les actes numériques, et qu'il devient difficile de savoir exactement dans quelle mesure une œuvre protégée peut être copiée et diffusée. Qui plus est, les auteurs et les éditeurs perçoivent une rémunération moindre qu'autrefois pour ce régime élargi, alors qu'ils doivent en outre se partager les sommes perçues avec des artistes, producteurs de musique et de films.
"La diminution par deux de leur rémunération pour droits de reprographie touche durement les éditeurs et les auteurs, surtout ceux qui débutent et dont la situation financière n'est pas fort enviable. Cette baisse draconienne rendra encore plus difficile qu'autrefois leur capacité de vivre de leur plume. De ce fait, beaucoup d'entre eux risquent d'arrêter prématurément. Quant aux éditeurs, ils seront moins enclins à continuer à investir dans l'innovation, y compris numérique. Bref, la création, la diffusion de l'information et la diversité culturelle sont gravement menacées. Il est important que les auteurs et les éditeurs soient correctement et justement rétribués. Ce n'est plus le cas avec la loi récemment entrée en vigueur. D'où notre appel à sa révision", explique Benoît Proot, porte-parole de la campagne "www.donnant-donnant.be".
La copie presque 3 fois plus coûteuse par page
Mais l’utilisateur désireux de photocopier une œuvre protégée est lui aussi touché au portefeuille. Autrefois, la redevance pour reprographie sur les copieurs et les appareils multifonctions était comprise dans le prix d'achat d'un appareil. La nouvelle loi supprime cette indemnité et la remplace par un prix de photocopie par page de 2,7 fois plus élevé que sous l'ancien régime. La redevance pour reprographie sur les copieurs et les appareils multifonctions était d'ailleurs moins complexe, car c'était une façon très efficace de percevoir les droits d'auteur.
"La majoration du prix par page touche les finances des utilisateurs, avec un risque évident : ils seront enclins à minimiser le volume de photocopies dans leur déclaration, ou le renégocier à la baisse. Cette conséquence cynique de la réforme touchera une seconde fois les auteurs et les éditeurs", commente Benoît Proot.
Campagne spécifique "donnant-donnant.be"
Il est important que les gens comprennent que les ouvrages qu'ils louent ou achètent, par exemple des livres, manuels éducatifs ou scientifiques, quotidiens et magazines, etc. ne sont pas un blanc-seing pour les photocopier ou les numériser sans limite, et surtout sans payer de rémunération à qui de droit. Dans le cadre de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, le lancement de la campagne d'information et de sensibilisation « donnant-donnant.be » veut le rappeler. Patrick Delperdange, Xavier Deutsch, Geneviève Damas, Francis Dannemark, DANY, Pierre Kroll, Caroline Lamarche, Evelyne Guzy, Marc Hardy, Véronique Bergen, Frédéric Saenen, Luc Dellisse, Nicolas Vadot, Corine Jamar, Edtih Soonckindt, Isabelle Wéry, Nathalie Skowronek, Fred Castadot, Corinne Hoex et Alain Berenboom soutiennent la campagne.
"Je peux supposer que certains utilisateurs ne sont pas ravis de la majoration du prix par page décidée par le ministre de tutelle, mais c'est une conséquence directe de la suppression par le législateur de la redevance pour reprographie sur les copieurs et les appareils multifonctions. Il est important que les utilisateurs continuent de payer correctement l'indemnité de photocopie. Notre campagne veut informer, sensibiliser, augmenter la disposition des gens à payer leur écot, expliquer pourquoi c'est nécessaire et pourquoi le prix par page a été majoré. Car en fin de compte, les auteurs, les éditeurs et les utilisateurs copieurs sont tous dans le même bateau", conclut Benoît Proot.
* Sociétés de gestion d'auteurs: Assucopie, deAuteurs, SABAM, SACD, SAJ/JAM, SCAM, SOFAM et VEWA
Sociétés de gestion d'éditeurs: Copiebel, Copiepresse, License2Publish, Librius, ReproPP, Repropress et Semu
** La redevance pour reprographie sur les copieurs et les appareils multifonctions a représenté en 2015 en Belgique 13, 4 millions d'euros, soit 55 % des droits de reprographie perçus par Reprobel